2- L’amour — 5 critères pour une relation épanouissante

Cet article est la suite d’un premier de trois sur l’amour et le couple : 1- l’amour – le territoire.

On peut être tomber amoureux(se) d’une personne avec qui une relation à long terme pourra s’avérer très difficile, voire impossible, et ce malgré une personnalité compatible. On peut essayer d’ajouter les critères physiques, qui sont d’autres caractéristiques propres à l’attraction,  tels la beauté, la forme, la taille, la musculature, la voix, la démarche. On peut également ajouter les valeurs, les idéaux , l’habilité à converser et la confiance en soi. Mais si toutes ces considérations ont un intérêt certain et ont influencé nos choix de partenaire, ce ne sont pas des paramètres essentiels au bon fonctionnement de la relation.

Dans certains cas, ces critères peuvent même nous tromper. Par exemple, au moment de décider si un ou une partenaire potentielle est à retenir, une personne fortement menée par son ego va prioriser l’apparence physique  et le curriculum vitae aux dépens de la qualité de la relation elle-même. Notre ego est davantage préoccupé par la recherche d’un trophée à présenter qu’une relation à vivre. Pour l’origine de cette remarque voir le lien en bas de page vers l’article How to Pick the Right Partner.

À long terme, une relation non pas épuisante, mais épanouissante

Une lecture m’a éclairé sur la possibilité qu’une relation humaine dure ET soit épanouissante : Arnaud Desjardins Pour une vie réussie, un amour réussi publié en 1985 m’a été d’une aide considérable pendant de nombreuses années et, en particulier, le chapitre consacré au mariage ou, si vous préférez, à la relation à long terme dans laquelle les partenaires s’investissent. Aperçu

Pour une vie réussie-Couverture

L’idée centrale de la deuxième partie de cette série d’articles est d’examiner certains éléments de la vie d’un couple du point de vue de cette possibilité. Je rappelle que la première partie concernait des conditions sans doute nécessaires, mais non suffisantes.

Swami Prajnânpad a proposé cinq critères pour développer une relation amoureuse épanouissante à long terme et Arnaud Desjardins les a transcrit. Les cinq critères sont :

  1. le sentiment d’être deux vrais compagnons : avoir un compagnon, une compagne, c’est le sentiment de ne plus se sentir seul ; le mari ou la femme doit aussi être notre meilleur ami ; il y a donc amitié profonde ;
  2. l’aisance et la facilité : le fait que les choses soient faciles, même au quotidien ;
  3. deux natures qui ne soit pas trop différentes ;
  4. une confiance réciproque absolue ;
  5. une forte pulsion à rendre l’autre heureux/heureuse.

Relation est en caractères gras, car il ne s’agit pas ici de critères pour évaluer un/une partenaire, mais plutôt pour évaluer la possibilité d’une relation épanouissante à long terme entre deux partenaires. Desjardins nous présente les critères de Prajnânpad qui permettent de savoir si deux êtres sont faits l’un pour l’autre dans un contexte particulier. C’est-à-dire :

  • Est-ce une relation qui conduira au bonheur et non pas à la souffrance celui ou celle qui s’est engagé sur le « chemin de la sagesse », de la paix intérieure, de la sérénité, de la stabilité intérieure?
  • Est-ce une relation qui comblera celui ou celle qui aspire à la possibilité de s’épanouir, d’évoluer et de communiquer véritablement ?

Bien sûr, il est quasiment impossible d’évaluer une relation durant la phase d’amour romantique, car on risque fort de lui donner une note parfaite sur toute la ligne. Il peut être nécessaire de laisser les choses se calmer un peu. Il faut donc résister quelques temps à la tentation forte de poser des gestes qui mènent à l’attachement, le temps de s’assurer de la viabilité à long terme de la relation. Dans notre culture, le mot « amour » est fortement relié à l’amour romantique et à la fascination amoureuse qui est l’émotion qui est vécue durant cette période. Hors, cette émotion ne dure pas, comme toute émotion d’ailleurs.

1- Amitié profonde : être deux vrais compagnons

Avoir un compagnon, une compagne, c’est le sentiment de ne plus se sentir seul/seule, c’est en fonction d’une durée, d’un chemin à suivre ensemble : croître, grandir, s’épanouir ensemble, progresser ensemble sur la voie de la maturité, de la plénitude, sans les émotions mesquines et infantiles de l’égo qui viennent rapetisser l’existence.

L’homme ou la femme doit être aussi notre meilleur ami. La femme doit pouvoir jouer pour l’homme tous les rôles qu’une femme peut jouer pour un homme ; et l’homme doit pouvoir jouer pour la femme tous les rôles qu’un homme peut jouer pour une femme. On se sent comblé et on n’éprouve pas la nostalgie de trouver ailleurs ce qui ne nous manque plus. Quelqu’un :

  • qui me comprend ;
  • que je comprends ;
  • avec qui j’aime échanger ;
  • avec qui j’aime partager ;
  • avec qui j’aime agir, faire les choses ensemble.

Ce sentiment d’avoir trouvé un véritable compagnon s’enrichit avec les années, il ne s’use pas.

2- Aisance et facilité

Ce critère est très simple : le fait que les choses soient faciles, aisées : on se sent parfaitement bien et tout est facile. Il ne s’agit pas ici des moments intenses, voire divins de l’amour romantique. Il s’agit d’une relation qui ne nous amène pas à dépenser une grande quantité d’énergie en émotions.

Non pas une relation de laquelle on peut dire : « Je l’aime, mais elle me fait souffrir… il me torture ». Pas plus d’ailleurs d’une relation dont la facilité vient de la monotonie et de la routine.

3- Compatibilité ou complémentarité

Il est normal qu’il y ait des différences et une complémentarité dans un couple. Nous ne trouverons jamais un autre nous-mêmes, une personne qui sera toujours exactement ce que nous voulons, qui aura l’état d’âme, l’humeur, l’expression du visage, le timbre de voix, les mots que nous voulons entendre. Et cela, il faut le savoir : il y aura toujours une différence. Vouloir le contraire est une demande infantile.

Toutefois, si deux natures sont réellement incompatibles, aucune vie commune n’est possible, car une bonne entente est au-delà des capacités respectives des deux partenaires. Malgré qu’on puisse être fortement attiré par une autre personne, si on est incompatible sur des points importants, la relation risque d’être trop difficile à vivre pour être épanouissante. C’est peut-être ici que s’applique le vieil adage stipulant que « l’amour rend aveugle ». Ma mère me prévenait contre une telle émotion : « être en amour avec l’amour, et non pas avec l’autre personne », c’est-à-dire être fasciné par l’amour romantique et ne pas voir clairement l’autre personne.

C’est sans doute ici qu’il peut y avoir rencontre entre d’une part la proposition Desjardins-Prajnânpad  et d’autre part, le travail d’Helen Fisher sur la compatibilité de personnalités dont j’ai parlé dans l’article précédent. Voici deux hyperliens pour revoir le travail d’Helen Fisher, soit : les quatre types de personnalités et un résumé succinct de leurs règles d’attraction.

Enfin, la compatibilité sexuelle entre deux individus se situe ici dans le thème plus général de la compatibilité et de la complémentarité. Il n’y a pas lieu de faire un point à part de notre sexualité : de ce qu’on désire, de la fréquence des relations sexuelles, de leur intensité, de la manière de les vivre, etc.

La complémentarité de l’homme et de la femme repose sur la possibilité d’association, d’imbrication, de complicité. Il faudrait être bien plus avancé sur le chemin de la liberté intérieure pour pouvoir former un couple paisible avec un partenaire dont la nature est radicalement incompatible  avec la nôtre.

4- Confiance absolue

Est-ce que je sens en moi cette confiance complète ? Est-ce que cet homme, cette femme a su m’inspirer cette confiance ? S’il n’y a pas confiance, c’est qu’il y a peur et sur cette fondation, aucun amour durable n’est possible.

Est-ce que cette femme / cet homme a su m’inspirer une réelle confiance? Du fond de moi monte ce sentiment : elle / il peut faire des erreurs, elle / il peut se tromper, elle / il peut même accomplir une action qui me créera une difficulté momentanée et que j’aurai à résoudre, mais elle / il ne peut pas me faire de mal. Fondamentalement, ce qui domine c’est cette certitude.

Le mariage ou une relation à long terme ne peut pas être une voie  vers la sagesse si cette confiance, cette foi n’existe pas, si vous vivez dans la peur. Vous avez à être plus forts que votre infantilisme et à ne pas détruire vous-mêmes une relation précieuse par une méfiance qui n’est en rien justifiée… Dans le couple en tant que voie spirituelle, la jalousie ne peut pas avoir sa place.

5- Forte impulsion spontanée à rendre l’autre heureux

La demande d’être heureux grâce à un autre est naturelle, normale, légitime, pour tous ceux qui ne sont pas encore des saints et, bien sûr, et bien sûr, je fais partie de cette immense majorité.

Mais, rendre l’autre heureux, c’est moins simple que ça en a l’air. Et cela exige une approche adulte du couple. Car il y a une manière tout à fait égoïste de vouloir rendre l’autre heureux, dans laquelle l’autre n’est pas vraiment en question. C’est l’autre tel que je le vois à travers mes demandes à moi, que je cherche à rendre heureux en lui offrant ce que j’ai envie de lui offrir, en faisant pour elle/pour lui ce que j’ai envie de faire pour elle/pour lui, mais sans tenir compte de ses véritables demandes. Et ici ressurgit notre troisième critère : deux êtres pas trop différents, deux êtres compatibles. S’il y a trop de différences, ce sera particulièrement difficile de voir ce dont l’autre a besoin.

Chacun attend de l’autre le bonheur. Et ce bonheur est aussi une réalité simple, quotidienne, faite d’une accumulation de petits détails. Prajnânpad disait : « Il n’y a pas d’action de donner sans l’action de recevoir. » Si vous donnez, mais que l’autre n’a pas reçu, c’est comme si vous n’aviez pas donné. Et si vous ne donnez pas ce que l’autre attend consciemment ou pas, ce qui lui est nécessaire, vous ne lui avez pas donné. C’est comme ne donner que de la viande à une lapin ou que de la salade à un animal carnivore : tous deux vont mourir de faim!

Beaucoup de parents affirment: « Je n’ai vécu que pour mes enfants. Je leur ai tout donné. » Et les enfants pleurent : « Je n’ai rien reçu. » Il n’y a pas d’action de donner, sans l’action de recevoir, que ce soit dans les relations parents-enfants, dans les relations humaines ou dans le couple.

Donner, ce n’est pas offrir ce que nous avons envie d’offrir au partenaire tel que nous avons envie qu’il soit, mais au partenaire tel qu’il est et tel que nous avons à apprendre à le voir, à le comprendre et à le ressentir. Ici intervient l’intelligence du cœur que voile nos émotions.

Cette envie de rendre l’autre heureux ne se fabrique pas artificiellement : rendre l’autre heureux en lui-même. Le désir est là ou il n’y est pas. Si la motivation à rendre l’autre heureux est morte, on est dans un espace de difficultés. Un être a besoin de respirer plusieurs fois à chaque minute et il a besoin de respirer l’amour tous les jours.

Avoir tout bon?

Il est difficile, voire impossible, d’avoir 100%. Il est peut-être même dangereux de chercher une perfection illusoire.

Mais, ce qui est particulier ici, c’est qu’il faut que chacun des cinq critères soient respectés au moins en bonne partie. On ne peut pas avoir parfait sur trois critères, mais rater totalement deux, voire même un seul de ces critères…. Ainsi, pouvez-vous vous imaginer vivre avec un partenaire :

  1. qui ne soit pas votre ami ; dans une relation dans laquelle il n’y a pas d’amitié profonde ?
  2. avec qui tout est difficile, c’est le conflit constant et le quotidien est invivable?
  3. avec qui il y a trop de différences ou d’incompatibilité pour le choix des activités, les choix de vie, ou les modalités de ces choix? Rappelons que c’est ici que se situe les relations sexuelles ; penser ici, entre autres, aux personnalités décrites dans 1- l‘amour – le territoire.
  4. ou à qui on ne fait pas confiance sur le plan de la fidélité ou le plan financier et ce pendant une relation à long terme ?
  5. ou qui ne nous rend pas heureux/heureuse et qu’on ne pourra pas rendre nous même heureux, car lorsqu’il nous donne, c’est ce que nous ne désirons pas. Dans ces conditions, puisque nous ne recevons rien, alors nous ne retournons pas le geste que nous avons reçu. Mais l’autre nous a bien donné quelque chose, alors il sera frustré de ne rien recevoir à son tour. Il faut voir que l’immense majorité d’entre nous ne sommes pas des « êtres éveillés », des saints. Ajoutons que si l’autre est égocentrique pour diverses raisons, les choses n’iront pas mieux sur ce plan.

Mais s’il y a un critère qui demande la quasi perfection : le quatrième, celui de la confiance réciproque. Peut-on n’avoir confiance qu’à 63% ?

Avoir eu des difficultés dans le passé, n’est pas nécessairement synonyme d’échecs futurs

Le sage Swami Prajnânpad lui-même ainsi que Arnaud Desjardins ont tous les deux eus des difficultés importantes dans ce domaine. Prajnânpad ayant quitté sa jeune épouse alors qu’elle était enceinte de leur première fille: il voulait se faire moine, mais son frère l’a persuadé de revenir auprès de sa conjointe.

Desjardins a eu une histoire d’amour avec la chanteuse Dalida alors qu’il était marié avec Denise et c’est Prajnânpad qui l’a encouragé à revenir auprès de sa conjointe. Donc, ils ont cheminé, ont vécu, ont eu des difficultés, ont éprouvé, ont réfléchi et ont changé.

Les statistiques prédisent plus de difficultés dans l’avenir encore à ceux qui ont échoué dans le passé. Mais ces statistiques ne disent rien de ce que font ceux qui échouent. Si ces derniers continuent à répéter ce qui les ont mené à l’échec …

Moi aussi, j’ai vécu beaucoup d’échecs, j’ai eu à me regarder et à réfléchir à ce sujet. Je sais davantage ce qui pose problème et le texte d’Arnaud Desjardins est celui qui m’a le plus parlé.

D’autres approches autour du même sujet

Suit d’autres considérations que je n’ai pas nommément intégrées à mes deux articles. Soit parce qu’elles en font partiellement déjà parties, soit parce que je ne les ai pas suffisamment « éprouvées » personnellement. Mais elles ont probablement un certain potentiel : à vous de juger.

Pour une approche plus humoristique sur le même sujet, consulter :

Pour quelles raisons nous épousons une personne qui ne nous convient pas ?

Quand sommes-nous enfin prêt à nous marier ?

Quand est-il temps de quitter l’autre ?

Pourquoi considérer le mariage ?

Six points de vue sur l’amour :

Et une série de huit points de vue étonnants sur le mariage, ou si vous préférez, sur une relation à long terme :

Lire le troisième article de cette série de trois : 3-L’amour — les sept péchés capitaux dans une relation.

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